Dans nos sociétés modernes, toutes les générations ou presque, sont affectées par de graves évènements, qu’il s’agisse d’assassinats, de guerres ou encore de crises politiques. Elles font aussi face à d’importants défis, qu’ils soient économiques ou environnementaux. Et quand l’avenir se montre incertain, le climat politique peut exacerber les tensions. Le critique social et journaliste du début du vingtième siècle H.L Mencken écrivait d’ailleurs : « L’objectif du corps politique est de maintenir les citoyens en état d’alerte, pour qu’ils réclament que soit assurée leur protection contre une multitude de dangers, dont la plupart n’est souvent que le produit de l’imaginaire collectif ». Nous sommes encouragés à être dans la crainte. Quand les évènements graves se produisent, il est normal de ressentir de la peur ou de la colère, de s’inquiéter pour son avenir ou celui des plus vulnérables autour de soi. En étant à l’affût, il est possible de remarquer une montée des inégalités, du racisme, des dégâts environnementaux, de l’homophobie, du sexisme, ou d’une multitude d’autres injustices.
Mais en réalité, ces défis sont les opportunités que l’humanité peut saisir pour avancer. Comme l’indiquait Ralph Waldo Emerson : « Les gens veulent mener une vie stable, parce que dans l’instabilité, l’espoir est rare ». Comment trouver la paix quand on traverse ces périodes difficiles ? En commençant d’abord par soi ; par prendre conscience de la façon dont nous gérons nos propres corps.
En situation de danger, quand notre système limbique active l’un des trois modes suivants : combat, fuite ou immobilisation ; nous nous en remettons à notre instinct de survie. Notre cerveau reptilien prend les commandes et notre néocortex, quant à lui, se limite à nous rappeler nos expériences passées. Des vagues de stress viennent alors nous submerger et nous anticipons ce qui va suivre. Quand les temps sont difficiles, ces vagues de peur et d’anxiété vont et viennent. Nous ne savons alors pas dire si la situation est en train de se dégrader ou si en réalité, nous prenons simplement conscience de la mesure des choses.
Alors comment réagir pour être constructif ? Simplement en étant là, ici et maintenant. En se connectant à son cœur. C’est là que l’amour, la sagesse, la grâce et la compassion résident. Avec une attention bienveillante dirigée vers soi, se demander ce qui compte le plus pour soi. Oui, les pensées angoissantes nous habitent, les deuils, les traumatismes aussi font partie de nous, mais il est conseillé de ne pas les laisser envahir son cœur. Prenez du temps pour apaiser votre esprit et vous tourner vers ce cœur. Sortez et levez les yeux pour observer le ciel. Inspirez et ouvrez-vous à l’immensité de l’espace autour de vous. Observez le mouvement : le cycle des saisons, l’essor et le déclin des dynasties, les ères de l’Histoire. Expirez et plongez dans votre conscience bienveillante. Pratiquez l’équanimité, soyez stables. Prenez exemple sur les arbres ; soyez ce point d’ancrage au milieu de tout le reste.
Thich Nhat Hanh nous rappelle que par les temps incertains, notre stabilité peut être un réel refuge pour les autres. « Quand les embarcations bondées des boat-people croisaient la route de pirates ou se trouvaient prises dans des tempêtes, si tout le monde avait paniqué, tous auraient été perdus. Mais il suffisait d’une seule personne, que celle-ci garde son calme et reste centrée, pour que le bateau ne chavire pas ; la voie de la survie était montrée à tous. »
Il y a 2000 ans, Rabbi Tarfon disait : « Ne vous laissez pas décourager par l’immensité des peines du monde. Vivez en étant juste, embrassez la compassion et marchez humblement à cet instant. Bien sûr, il n’est pas attendu que vous sauviez le monde, mais vous avez le devoir de rester concerné, de ne pas abandonner. » En cette période difficile que nous partageons, faisons avant tout de notre cœur, un espace de paix. Et ensuite, avec le courage et la tranquilité, nous pourrons agir, parler, aider ceux dans le besoin, dialoguer avec les autres, s’engager en politique, apporter de la nourriture à ceux qui ont faim, porter de l’attention aux plus vulnérables, contribuer au grand tout.
L’écrivain Clarissa Pinkola Estes le disait : « Nous n’avons pas le devoir de guérir le monde entier sur le champ, mais nous avons celui d’essayer de faire ce qui est en notre pouvoir ». Ensemble, avec de la compassion pour ceux qui nous entourent, nous pouvons nous retrousser les manches et marcher en quête de cette vérité.
Traduction de l’anglais par Héléna Henry – 22/12/18