« Il est difficile au milieu du brouhaha de notre civilisation qui a le vide et le silence en horreur d’entendre la petite phrase qui à elle seule peut faire basculer une vie :
« Ou cours tu ? »
De mode en mode, de nouveauté en nouveauté, d’innovation en innovation, de catastrophe du jour en catastrophe du jour, rien n’est plus vieux que le journal d’hier.
Nous voilà fouetté en avant comme des cerceaux, slogans, rythmes, musiques de fond, logorrhés sournoises, une radio toujours branchée, cris, appels nous incitant à courir plus vite, à laisser derrière nous les tombereaux de déchets d’immondices que nous produisons sans répit
Sans projet de civilisation, sans vision, nous ne faisons qu’amplifier la sono et foncer… En fait ce mode de comportement est le plus ancien dont l’homme moderne ait la ressource lorsqu’il y a danger : Fuis, sauve toi, cours pour ta vie. En courant l’homme moderne tende d’esquiver la légion de fantômes à ses trousses.
Il y a des fuites qui sauvent la vie : devant un serpent, un tigre, un meurtrier. Il en est qui la coûtent.
La fuite devant soi-même et le fuite de ce siècle devant lui-même, et celle de chacun de nous
Comment suspendre cette cavalcade forcée sinon en commençant par nous ?
En considérant l’enclave de notre existence comme le microscope du destin collectif … »
Extrait du livre « Où cours tu ? Ne sais tu pas que le ciel est en toi ? » de Christiane Singer